Les Secteurs d'améliorations rurales d'Algérie

Ni déracinement ni prolétarisation

Les secteurs d'Améliorations Rurales d'Algérie sont en constante croissance. On en a lancé 12 en 1946. Ils sont 122 à présent. Pourtant, en dépit de cette croissance, au rythme actuel. Ils ne suffiront ni à sauver la terre d'Algérie, ni à résoudre le problème démographico-économique que nous avons exposé au début. Il faudra, au rythme actuel, au moins trente ou quarante ans pour contrôler l'ensemble des terres musulmanes consacrées aux céréales ; dix ans pour contrôler le cheptel ovin, en admettant qu'il ne s'accroisse pas ; pour l'arboriculture et la phoeniculture des délais peuvent être encore plus longs. C'est dire qu'un effort supplémentaire s'impose, et que si le budget algérien n'y suffit pas, la Métropole devra concourir au financement des SAR. C'est dire aussi que ces SAR ne doivent pas être considérés comme une panacée unique, qui dispense de tenter d'autres expériences. Pour l'élevage ovin, par exemple, leur équipement devrait être complété par tout un réseau de fermes modèles et par l'organisation d'une transhumance estivale. C'est aussi un développement de la moyenne et petite hydraulique qui s'impose.

Quelles que soient ces réserves, l'effort des services du Paysannat est en train de recréer l'Algérie. C'est une conquête pacifique de la terre par les autochtones eux-mêmes. C'est une œuvre d'éducation. La formule des Secteurs d'Améliorations Rurales a cette qualité, primordiale à nos yeux, de créer de la richesse sans engendrer un prolétariat. Ils ne sont pas une œuvre de collectivisme, nous l'avons dit. Mais ils sont aussi complètement en dehors de l'ornière capitaliste. Autre mérite : ils ne renversent pas les structures traditionnelles. Créés dans le cadre du douar, ils s'insèrent naturellement dans le système tribal. Ils donnent un rôle dans  l'économie moderne à ces structures ancestrales. Encore une fois ils créent de la richesse sans déraciner ni prolétariser. C'est pourquoi cette expérience nous a paru doublement valable. Valable d'abord parce qu'elle ressuscite la terre d'Algérie, valable ensuite parce qu'elle indique une voie à suivre pour développer l'économie de nos territoires d'Outre-Mer.