Les Secteurs d'améliorations rurales d'Algérie

Une école de municipalité

Le SAR ainsi créé, est géré, sous le contrôle du Président de la SIP par un certain nombre d'autorités. En premier lieu le Chef de Culture, dont le rôle est déterminant puisque c'est lui qui enseignera les méthodes culturales modernes. On peut dire que de sa qualité dépend le succès ou l'échec du Secteur. Mais ce chef de culture n'est pas une sorte de petit dictateur. Il est assisté par un Comité de gestion. Ce Comité de gestion est particulièrement intéressant. L'Administration a estimé, en effet, que « afin de compléter l'éducation économique des Fellahs, il importait non seulement de les convaincre de la nécessité de perfectionner leurs méthodes en leur imposant, au moins au début, une certaine discipline, mais encore de les associer, le plus étroitement possible, à la gestion de leur SAR. « Aussi a-t-on constitué ce Comité de gestion comprenant quatre membres élus par les représentants du SAR en son sein. Ce comité est présidé par le président de Section de la SIP. Rappelons que le Conseil de Section de la SIP, en Algérie, est élu et choisit lui-même son président.

Voilà pourquoi on a pu dire, à juste titre, que le SAR était une véritable « école de municipalité ». Dans le Conseil de Section de la SIP comme dans le Comité de Gestion le Fellah y apprend à gérer des intérêts généraux.

Quant à l'équipement du SAR il comprend un équipement collectif et un équipement individuel. Nous n'entrerons pas dans le détail de cet équipement. Nous voudrions seulement souligner que l'accent est mis sur l'équipement individuel des Fellahs. Les SAR ne sont pas une entreprise de collectivisation et, à leur sujet, bien des contre-sens ont été commis. Ils ne sont à aucun degré des Kolkhozes ; et le matériel mécanique collectif doit être limité au nécessaire. Par contre, on cherche à faire des Fellahs de vrais exploitants au sens où nous l'entendons dans la Métropole. On cherche à créer de vraies familles paysannes.

Le noyau initial est formé soit de Fellahs propriétaires de leur lopin, soit de khames ou de journaliers qu'on recase en leur fournissant, outre les moyens de production, la terre et l'habitation. Cette dernière formule, abandonnée depuis, semble avoir eu à l'origine la faveur de l'administration. Pour notre part, elle nous paraît beaucoup onéreuse. Chaque « recasé » revient, en moyenne, à un million. Les exemples de SAR avec recasement que nous avons visités ne nous ont pas parus encourageants. Sans doute les heureux bénéficiaires étaient-ils fort contents de leur sort. Ils l'exprimaient pittoresquement en nous expliquant que l'Administration était « leur père et leur mère ». Mais la plupart du temps on avait l'impression d'une certaine dilapidation. Comment juger autrement ces maisons du SAR de Sidi Lakrout, près de Tablat, qui sont revenues à 700 000 fr l'une ? Cas extrême, sans doute, puisqu'actuellement, les habitations du SAR de Temelhat, dans le Cheliff, ne reviennent  qu'à 100 000 fr. Malgré tout, le SAR de recasement nous a paru le type de ces réalisations spectaculaires destinées à frapper un Gouverneur Général en tournée ou une mission parlementaire.

Ce caractère onéreux du SAR avec recasement frappe d'autant plus qu'étant donné la grande prédominance de la petite propriété en Algérie, ce recasement n'y paraît spécialement nécessaire et que surtout, dans l'ensemble, le SAR est une formule à prix de revient relativement peu élevé, le principalement financement étant fait par des avances à long, moyen ou court terme plutôt que par des subventions. Celles-ci sont réservées aux dépenses irrécupérables et aux frais de démarrage.