Impasse en Algérie ?

France-Forum n°2 1957 pp. 14-21

Résoudre le problème algérien ? Il faudrait d'abord savoir le poser. On parle de problème, comme s'il s'agissait d'un de ces problèmes de robinets, tels qu'on en demande au certificat d'études, avec des cuves hypothétiques et une tuyauterie fictive, avec des débits et des capacités inconciliables. Certes ces robinets et ces cuves ont inspirés une des plus belles pages de Péguy. Mais à parler ainsi du « problème algérien » et – faute de le résoudre – à en jouer les solutions sur tous les échiquiers de la politique intérieure et de la politique étrangère, n'oublie-t-on pas que l'Algérie, c'est d'abord une terre, avec des hommes, une Géographie, une Histoire, une Ethnologie, une Tradition, une Économie et puis aussi tous les bouillonnements d'un monde en fusion ? Et, tandis que nous dissertons calmement, que dans notre métropole nous menons une vie benoîte, irrités seulement de manquer d'essence, n'oublions-nous pas que l'Algérie est aujourd'hui un réservoir de souffrance ? Les cuves et les robinets du malheur n'y sont pas fictifs. Misera Italia, albergo di dolore, écrivait Dante de l'Italie de son temps. « Auberge des douleurs » ? Ne l'est-elle pas, notre misérable Algérie, pour une fois toutes ses populations confondues ?