Où va le nouveau Maroc !

Difficultés économiques surmontées

Analysant les difficultés et les ambiguïtés de la politique marocaine, je ne voudrais pas que le lecteur se trompe. L'existence même de ces difficultés prouve la stabilité retrouvée par le Maroc. Elles ne se poseraient pas dans le chaos. Pour ramener la paix le Souverain et ses Ministres en ont affronté de plus redoutables. À cette politisation excessive, le prestige du Souverain et son habileté sont un contrepoids. Non que ne se dessinent des courants républicain, plus profonds même que je ne le soupçonnais. « Tant que les structures du nouveau Maroc ne seront pas assises, nous ne pouvons nous passer d'un tel homme », m'a dit un leader de l'Istiqlal. Il exprimait ainsi et les limites du sentiment monarchiste et l'autorité personnelle de Mohammed V. Mais nous reviendrons sur l'évolution possible du Maroc indépendant.

Et puis le Gouvernement Marocain n'a-t-il pas franchi des obstacles économiques que les meilleurs observateurs jugeaient insurmontables ? C'est un fait que depuis une dizaine de mois les valeurs marocaines ont remonté de 30%. La fin du protectorat et l'exode des français qui suivit l'affreuse affaire de Meknès avaient provoqué un redoutable « désinvestissement ». À l'époque une marée inflationniste s'est déchaînée : elle semble nettement arrêtée. Les dépôts bancaires se sont gonflés. Sans doute est-ce un signe de marasme que cet argent ne soit pas employé : c'est aussi le signe qu'il ne fuit plus le pays. Le commerce extérieur s'est contracté, mais les exportations remontent. Le plus grave avait été le recul de la production agricole (60%). On commence à voir un redressement impressionnant. La quasi totalité des colons français ont pu se remettre au travail, et « l'opération labour » qui est une réussite, peut changer les conditions du fellah. Le chômage, qui atteint des proportions graves, est en régression constante et sensible. Au point de vue industriel, si la construction demeure gravement touchée, si le Gouvernement marocain ne défend peut-être pas assez une industrie textile pourtant riche d'avenir, des entreprises nouvelles se sont lancées : citons l'installation, à Sidi-Yahia, d'une usine de cellulose dont l'exportation s'est déjà élevée à 2 500 tonnes depuis l'entrée en exploitation. Sa production actuelle est de 35 tonnes par jour.

Le Soulier de Satin porte en sous-titre : « le pire n'est pas toujours sûr ». Curieuse rencontre que plusieurs scènes de cette pièce se déroulent à Mogador.