L'âge d'or

A Nicole

St Jean de Luz 3/7/41

 

Une plage qui fleurirait pour l'amour. On y verrait des balcons de roses et des hortensias sous les tamaris, passés et pâles. L'air embaumé par leurs odeurs lentement glisserait vers l'eau, s'y chargerait d'un parfum plus fort et reviendrait poussé par la vague. La mer, le ciel seraient bleus, et bleues seraient les montagnes qui fermeraient le pays heureux.

Pour les franchir il ne faudrait que s'aimer. Dans la paisible fin du jour, quand s'étire vers l'horizon l'ombre des meules, des couples marcheraient, religieux, lents, ils descendraient les chemins parfumés de troènes et de chèvrefeuille.

Les couples heureux marcheraient dans la liturgie du couchant vers la mer étale, drapée de rose. Et longtemps ils se parleraient...Ils s'arrêteraient en des jardins aux allées de cyprès, paisibles  campi santi (?) d'autres amours et sous le ciel palissant ils goûteraient des choses délicates.

Ma chère aimée, nous parcourons le doux pays de l'amour. Qu'importe s'il n'existe pas, nous en crevons le mirage. Qu'une touffe de capucine brille en notre chambre et nous aurons ces jardins de roses, nous aurons les terrasses sur les frondaisons voyantes (?). Oh ! Respire longtemps ces fleurs, ne parle pas. Savourons le pays heureux de notre mirage.