Raymond Cartier contre le cartiérisme

Elle n'est pas excessive

En outre, et si on met à part l'Algérie, l'effort n'excède pas nos possibilités. M. Cartier, nouvelle manière, a procédé à deux excellentes mises au point. La première est d'avoir fait observer l'erreur commise quand on apprécie en pourcentage du revenu national l'importance de l'aide que nous apportons aux pays sous-développés. Un tel calcul, souvent répété est absurde, car le revenu national est absorbé par tant de dépenses incompressibles qu'on peut imaginer un pays consacrant tout l'excédent de son revenu au Tiers-Monde sans que pour autant le pourcentage de son revenu national appliqué à cette aide apparaisse considérable. En fait, c'est par rapport aux investissements effectués à son propre profit qu'il convient de faire le calcul. Et il est certain que, compte tenu de l'Algérie, l'effort entrepris par la France est excessif car il a lieu au détriment de notre substance et compromet notre avenir. La seconde mise au point est non moins opportune. C'est le « raisonnement de la tartelette » qui répond à un discours assez irritant naguère prononcé par le Président Senghor. Selon celui-ci, quand nous construisons un port outre-mer, en fin de compte tout l'argent nous revient – ou au moins une grande part – sous forme d'économie du personnel, de paiement de matériel, etc... Mais, ce que ne voit pas le Président Senghor, c'est que si ce port avait été construit chez nous, cet argent aussi serait resté chez nous, et en plus nous aurions un port de plus à nous. Ces mises au point étaient opportunes.

Seulement que ce port enrichisse un pays sous-développé, que l'Afrique en soit doté, c'est justement ce que nous sommes en droit de souhaiter. Et l'intérêt que représente l'évolution de M. Cartier, c'est qu'il le reconnaît. Il admet désormais, à l'encontre des cartiéristes du style « Aurore », que le bien même des pays développés suppose le développement du Tiers-Monde.