Maroc

Restaurer l'administration marocaine

Voyons d'abord ce qui ne dépend que de nous, Français.

La première condition de toute politique est d'en posséder l'instrument. Au Maroc, l'instrument de notre politique – c'est-à-dire l'administration – est dégradé. Notre premier devoir, préalable à toute action, est de le restaurer.

Tel est le fruit du gouvernement par des Résidents militaires. Les militaires savent commander. Ils ne savent pas gouverner. Ainsi leur méthode pouvait-elle valoir pour le vieux Maroc, ce Maroc cavalier qui se commandait comme une armée. Elle ne vaut plus pour ce Maroc composite – motorisé, si je puis poursuivre l'image – que nous ont légué quarante ans où il a évolué comme en trois siècles. Le Maroc n'est plus un pays à commander, mais à gouverner, et plus difficilement peut-être qu'aucun autre.

Or, à commander sans gouverner, les Résidents militaires ont laissé l'Administration à vau-l'eau. Certes, la plupart des éléments en sont valables. Je ne rendrai jamais un assez grand hommage à ces contrôleurs civils que j'ai vu dans le bled, ou aux officiers d'AI. Peut-être nulle part n'ai-je rencontré autant d'hommes de classe qu'au Maroc. Officiers d'AI et contrôleurs civils, ajouterai-je, sont même la seule protection efficace des Marocains. Seulement, à la tête, plus rien n'est coordonné. Dix politiques parallèles sont menées par des potentats administratifs qui songent surtout à s'entrebattre et à se paralyser mutuellement. Ainsi s'explique l'espèce de prime accordée de haut en bas à qui n'a pas de caractère. Ainsi s'explique surtout l'arbitrage exercé par les prépondérances économiques.