Réponses à un questionnaire

1- Répercussions de la disparition de Maga au Dahomey : querelle Dahomey-Niger ; situation de l'entente

La disparition de Maga au Dahomey a plus inquiété les dirigeants en place qu'elle n'a encouragé les oppositions. Il existe toujours une sorte de syndicat spontané des hommes en place. C'est ainsi que ceux-ci se sont émus de la disparition d'un Sylvius Olympio qu'ils n'aimaient guère et qui faisait bande à part, ou d'un Youlou qu'ils méprisaient. Mais, en fait, la disparition de Maga a eu moins de répercussion psychologique dans les États voisins. Le Dahomey a toujours été considéré comme un pays à part, très indiscipliné, déséquilibré par la disproportion entre une élite relativement nombreuse et l'absence de moyens économiques pour la faire vivre selon ses aspirations. En outre, la masse africaine déteste les Dahoméens. Ceci empêche leurs révolutions d'être exemplaires.

Quant à la querelle entre le Dahomey et le Niger, les États voisins ont eu surtout souci de l'empêcher de s'étendre et de dégénérer. Ajoutons qu'il était difficile de prendre tout à fait au sérieux, cette querelle pour une île submergée pendant six mois de l'année et où, pendant les six autres mois, peuvent paître quelques chèvres. Il est difficile de parler de cette querelle aux dirigeants des pays voisins, car ils en sont humiliés. On peut donc penser qu'ils empêcheront cette querelle assez bouffonne de dégénérer.

Cette affaire a souligné un fait qu'on connaissait bien : l'Entente n'est plus guère qu'un mot. On montre avec un peu d'ironie son Secrétariat Général de Ouagadougou. L'Entente est une construction politique en quelque sorte accidentelle. Elle a été montée par Houphouet Boigny, au lendemain de l'indépendance, pour empêcher la reconstitution de ce grand Mali qu'il venait de faire avorter en en détachant la Haute-Volta. Mais depuis lors, la tension entre la Haute-Volta et la Côte d'Ivoire a été constante. Elles sont d'ailleurs en moins mauvais termes à présent. Quant aux rapports Côte d'Ivoire – Dahomey, c'est après la constitution de l'Entente que les Dahoméens ont été massacrés à Treichville.

Il faut surtout se garder de voir l'Entente comme une espèce d'Alliance ou de Confédération à l'Européenne. C'est quelque chose de spécifiquement africain, donc de déroutant pour nous. Les rapports d’États y sont déterminés par des questions de personne : d'où ses heurts, ses contradictions, ses incertitudes.